Une course d’ultra trail en semi-autosuffisance. Une course démentielle, inimitable. Le Tor des Géants -rien à voir avec la divinité nordique du Tonnerre- s’écrit sans h, et veut dire tour en valdôtain. Les géants n’ont rien à voir non plus avec des dieux. Ce sont les 5 montagnes majestueuses de plus de 4000m qui surplombent le tour : le Mont Blanc (4810 m), le Mont Rose (4634 m), le Cervin (4478 m), le Grand Combin (4314 m) et le Grand-Paradis (4061 m).
Unе sеulе étаре, à аllurе lіbrе еt еn tеmрs lіmіté. Une cоmрétіtіоn mythique quі аssоcіе lоnguе dіstаncе еt аutоnоmіе. Cеluі quі tеrmіnеrа cette cоursе exigeante et difficile еn gérаnt au mieux sеs rероs et ses ravitos sera le gagnant.
Départ du val d’Aoste, Courmayeur, ce dimanche à midi pile.
Jean-Yves nous raconte sa passion et sa préparation pour cette course unique au monde!
#1. Qu’est ce qui te caractérise ?
Je m’appelle Jean-Yves, 51 ans. Un parcours professionnel au service du public depuis 32 ans, successivement dans l’armée, la police et le déminage. Découverte du dépassement de soi à l’âge de 18 ans lors de mon engagement. Et c’est un truc qui reste.
#2. Quel a été ton parcours sportif jusqu’à aujourd’hui?
C’était l’époque de Mark ALLEN et Dave SCOTT , les dieux de l’endurance
Pratique du footing puis rapidement l’envie de marathon (résultats sympas pour un gamin :-)). Le triathlon s’est rapidement imposé comme évident : c’était l’époque de Mark ALLEN et Dave SCOTT , les dieux de l’endurance. Et du coup on se dit : moi aussi je veux faire de l’IRONMAN.
#3. Ta maladie, c’est plutôt un moteur ?
Quelques années de pratique, beaucoup de plaisir et rappel à l’ordre d’une pathologie qu’on traîne dans ses gênes depuis l’enfance : la polyarthrite rhumatoïde déformante (sans doute un des moteurs de la motivation : ne pas accepter la fatalité). Quelques années (15 ans) sans sport (multiples traitements lourds !), de brefs passages par le footing mais trop souvent dans la douleur.
#4. Tor des Géants, pourquoi cette aventure ?
Et puis il y a 5 ans une envie, un besoin de s’y remettre, une trêve dans les douleurs, une fenêtre de soulagement, que faire ? Du triathlon, de l’Ironman ? Le temps avait passé et de regarder passer les coureurs sur l’Ironman de Nice, je ne me reconnaissais plus dans ce monde aseptisé sans valeur de partage.
#5. L’ultra trail, qu’est-ce que tu y as appris?
Le trail est apparu comme le sport ou le partage et l’entraide sont encore des valeurs essentielles. Premier essai un 47 km (ouïe ouïe !! ça fait mal !!), puis 80 et enchaînement de 4 ultra de 145 km.
#6. As-tu expérimenté la solidarité dans les longues distances et les amitiés qui s’y nouent ?
Quelques heures partagées avec un pote de galère et on a l’impression de se reconnaître en lui
Et c’est là qu’on fait de belles rencontres humaines : quelques heures partagées avec un pote de galère et on a l’impression de se reconnaître en lui. Des moments de partage intenses.
Trois années d’attente pour enfin être tiré au sort
Après ça, l’envie de dépassement restait intacte. Seule solution : trouver LA course où le seul résultat acceptable est de passer la ligne d’arrivée. Le TOR DES GEANTS (352 km et 27450 D+, 150 h max ). Trois années d’attente pour enfin être tiré au sort mais cette fois c’était OK. La réponse est tombée le 28 février 2019.
#7. Parle-nous de ta préparation et ton entrainement
Il était temps de s’y mettre car 103 kg pour 1,89 m, on part de loin. Et sans attendre la fonte des neiges… L’entraînement a été progressif jusqu’à une nouvelle alerte en mai : verdict, les rhumatismes ont attaqué le cartilage de la hanche gauche : Pff !!
Deux mois à courir les spécialistes pour finir par une infiltration dans l’articulation et pas de miracle, une grosse gêne est toujours là. Bon le 1er juillet est arrivé, il est temps de s’y remettre !!
Du dénivelé et parfois seul pendant 6 à 8 heures, ça forge le mental
La prépa a été très chronophage car il a fallu passer beaucoup de temps en montagne. De longues randos avec du dénivelé et parfois seul pendant 6 à 8 heures, ça forge le mental !! Et même des nuits passées à dormir en altitude dans le van pour faire du globule comme on dit.
#8. Ton physique a changé, comment as-tu fait ?
La balance a été progressivement gentille puisqu’elle m’a soulagée de 10 kg. Certes l’objectif diète n’est pas atteint mais les céréales de la bière et les féculents des apéros n’ont pas pu disparaître. Pourtant dans les plans, ces éléments y étaient !! J’ comprends pas !!
Seule chose que j’ai effectuée sérieusement c’est la prise de compléments pour pouvoir supporter la charge d’entraînement : Prise de protéines Whey Superset chocolat , Pancake Superset et boisson de récup R3LOAD de chez SCITEC NUTRITION. Merci Fitadium… Le top !!!
La protéine indispensable
Idéal pour les gourmands
#9. L’organisation c’est lourd ?
Élément indispensable dans la prépa : avoir la femme parfaite car oui !! il faut supporter toutes ces absences d’égoïste !!
Voilà, l’entraînement est derrière, le départ est dans 4 jours !!
#10. Qu’est-ce qui te pousse dans ce défi envers toi-même ?
Le voyage intérieur va pouvoir commencer… il va falloir faire avec les douleurs, gérer tous les problèmes et c’est là que ça devient sympa. Pourquoi faire une course où le seul souci est le chrono ? Cette fois le manque de sommeil, les problèmes musculo-squelettiques, les douleurs gastriques, les baisses de moral, les nuits seul en altitude, la difficulté à s’alimenter vont tout faire pour nous empêcher d’arriver.
La moitié de ceux qui prennent le départ ne verra jamais la ligne d’arrivée !!
Il va être indispensable d’aller chercher au plus profond de sa motivation pour ne pas passer à la trappe !!! Ne pas s’emballer car : quand tout va bien, profite, ça ne va pas durer !! Et quand ça va mal, sois patient, cette fois ça risque de durer !!! Rappelle-toi me disait un ancien : la moitié de ceux qui prennent le départ ne verra jamais la ligne d’arrivée !!
#11. Qu’est-ce qui te fait avancer dans cette course dans la nature ?
Prendre les choses et les problèmes les uns après les autres, trouver les solutions pour continuer à avancer
L’envie du départ est forte, l’envie de voir ces décors extraordinaires de la vallée d’Aoste, l’envie de l’inconnu, de la remise en question. Je n’ai pas réellement de plan de course : prendre les choses et les problèmes les uns après les autres, trouver les solutions pour continuer à avancer.
#12. L’objectif c’est quoi ? de terminer ? Ou quelle que soit l’issue, d’en tirer des leçons
Si le Dieu des Montagnes me laisse passer, je passerai la ligne d’arrivée avant samedi 18h. Ce sera la plus belle des lignes d’arrivée. Les récits de beaucoup de finishers disent qu’il y a un avant et un après le Tor : on en revient différent. Réponse le 14 septembre !!!
Merci Jean-Yves, on a hâte et on croise les doigts!
Toutes les étapes du Tor des Géants du 8 au 15 septembre 2019
– Cоurmаyеur /Vаlgrіsеnchе : 49 km (3996 D+)
– Vаlgrіsеnchе /Cоgnе : 56 km (4141 D+)
– Cоgnе/ Dоnnаs : 44 km (3348 D+)
– Dоnnаs/Grеssоnеy St Jеаn : 53 km (4107 D+)
– Grеssоnеy St Jеаn /Vаltоurnеnchе : 39 km (2601 D+)
– Vаltоurnеnchе /Оllоmоnt : 44 km (2702 D+)
– Оllоmоnt /Cоurmаyеur : 48 km (2880 D+)
A l’heure où vous lisez cet article, les résultats sont tombés: Jean-Yves termine 384 sur 564 finishers, 900 inscrits au départ, 380 abandons.
« FINI EN 142 H ET 50 MINUTES
Salut tout le monde, voilà c’est terminé (le plus dur c’est quand ça s’arrête !!). Je vous remercie tous pour votre soutien (oui, Jean-Yves avait un groupe What’s App rien que pour lui, sur lequel amis et famille se sont rassemblés pour l’encourager sur ce long périple).
Fred, mon assistant lors de cette aventure, me faisait lecture de vos messages pendant ma LENTE progression !!
Je vais plutôt bien, un peu de repos et de kiné, et le vieux viking pourra remonter dans sa montagne. C’était un voyage « intérieur » dont on revient changé (je n’ai pas dit amélioré, faut pas rêver !). Je connais maintenant ce qui est essentiel pour moi et je vais m’y consacrer pleinement : oui oui, je parle bien des fesses de ma femme !!!!
La montagne vous apprend qu’en haut, dans la douleur et la dureté des élements, il n’y a pas de place pour tous les défauts de la nature humaine, j’invite donc tous ceux qui pèchent par fierté, jalousie, orgueil, ou qui sont dans la comparaison et le paraître de faire le TOR des Géants pour que la montagne vous ramène à ce qui a un sens. Merci encore à vous.
Le rouquin »